Le mot "traversée" évoque en premier lieu un exploit, qu'il s'agisse de celui de Louis Blériot (Manche) ou de Charles Lindbergh (Atlantique) en avion. Au-delà de la performance, la traversée fait penser au voyage, à la recherche d'un ailleurs, à la découverte d'un monde nouveau.
Ainsi, sur d'improbables embarcations, des hommes ont bravé des mers à la conquête de terres inconnues, et parcouru des distances incroyables, voyages aller sans espoir (ni peut-être envie) de retour.
Loin de ces odyssées, j'ai connu mes premières traversées sur des navires marchands, Atlantique, Saint-Laurent, Grands Lacs canadiens. Ici nulle performance, mais la découverte était au rendez-vous.

Plus près de Cap Oniros, ma première traversée à la voile de Marseille à Athènes annonçait les prémices de cette aventure. Dès les Bouches de Bonifacio franchies, mes compagnons et moi faisons cap sur les Lipari, les îles Eoliennes qui doivent leur nom au dieu grec des vents. "C'est une île qui flotte, une côte de bronze, infrangible muraille, l'encercle tout entière;..." (L'Odyssée, chant X). Là, le roi Eole donna à Ulysse l'outre des vents afin de lui assurer un retour tranquille vers Ithaque. Trop curieux, ses compagnons ouvrirent l'outre qui libéra les vents, ramenant la flotte près de l'île d'Eole, bien moins aimable qu'à la première visite.
Mieux avertis qu'en ces temps troublés, nous évitons à la fois les Lestrygons et Circé pour nous diriger vers le détroit de Messine, où nous attendent Charybde et Sylla, tourbillons bien réels au nord de ce passage. Cap au sud, puis à l'est pour contourner la botte italienne et faire route vers la Grèce et ses îles Ioniennes. Oniros, notre voilier empruntera cette même route pour rejoindre les eaux grecques en 2010.

Aujourd'hui, les traversées de Cap Oniros font découvrir la mer Egée, d'Athènes à Kos ou Rhodes, ou dans le sens est-ouest pour retourner vers la capitale hellénique. Pour se rendre de l'Attique au Dodécanèse, s'offrent de multiples variantes, que l'on peut classer en "route Nord", "route Sud" et "route Médiane".
Chacune de ces routes permet de découvrir des îles peu connues, tout en faisant escale en des lieux incontournables que sont Patmos et Mykonos au nord, Santorin au sud, et Amorgos sur la route médiane. Le choix de la route sera guidé par la sensibilité de chacun, mais surtout par les conditions météorologiques : la présence du Meltem, ce vent étésien* incite à adopter une route plus au sud, alors que des vents du sud font en principe opter pour une route plus au nord.
* étésien : le Meltem est un vent du nord qui souffle sur la Méditerranée orientale de mai à octobre, en arc de cercle sur la mer Egée. Il est en général modéré en mai-juin et en septembre-octobre, atteignant son apogée en août. Etésien vient du grec "étos" qui signifie "année", "meltémi" voulant dire "annuel".

Partons d'Athènes à la découverte de notre traversée, plus précisément de Lavrion, au sud de la côte de l'Attique près du cap Sounion. Pour la visite des premières îles, je vous renvoie au billet du skipper sur les Cyclades de l'ouest.
Vient ensuite le choix de la route générale. Suivons tout d'abord la route Nord : un coup d'œil à bâbord pour s'assurer que le meltem ne va pas perturber la traversée, et cap sur Syros la capitale des Cyclades.
Nous nous installons dans la petite baie de Finikas, au port s'il y a de la place, ou au mouillage. Ambiance tranquille, il y a là une des meilleures boulangeries des Cyclades, et un bus pour nous rendre à Ermoupolis, la ville d'Hermès, le dieu du commerce. Les amateurs d'églises seront servis, catholiques, orthodoxes, il ne faut pas hésiter à grimper sur les hauteurs de la ville pour y accéder. Egalement à voir, le théâtre de marbre d'Apollon, petite réplique de la Scala de Milan, les rues en marbre et la mairie au style néo-classique.

Appareillons pour Mykonos, réputée pour sa vie nocturne. En dehors de la saison d'été, elle est moins peuplée, et on apprécie son esthétique, île plate aux couleurs douces, un peu à l'opposé de sa réputation. Si les circonstances le permettent, et sous réserve d'autorisation, nous aurons peut-être la chance d'aborder l'île de Délos, le centre spirituel des Cyclades et ses richesses archéologiques.
Reprenons la mer pour la longue étape de notre périple, 60 milles plein est vers Patmos. Là nous attend le monastère de Saint Jean le Théologien, et la grotte de l'Apocalypse, où notre apôtre aurait écrit ce livre de la Bible. Le monastère domine l'île et l'on peut s'y rendre à pied, agréable promenade d'une heure passant par la grotte. Là-haut, on pourra entre autres admirer au musée de belles œuvres, dont certaines du Gréco.
Après ces étapes réputées, nous allons maintenant voguer vers des destinations plus intimes, parcourant le chapelet des îles du Dodécanèse, en commençant par Lipsi, l'île sauvage aux belles plages de sable, puis Leros longtemps oubliée ou maudite pour avoir été utilisée comme lieu d'exil pour les prisonniers politiques, et aussi comme hôpital psychiatrique. Nous longeons ensuite Kalymnos la rocheuse et ses parois qui font le bonheur des grimpeurs pour atteindre Kos, la ville d'Hippocrate, le père de la médecine et son fameux serment. Flânons dans cette ville agréable au marché couvert, visitons ses ruines, son Asclépeion et ses remparts des chevaliers de Saint Jean...

Retournons maintenant vers l'ouest pour suivre les autres itinéraires qui nous mènent à Sifnos, l'île fleurie. Nous devons choisir de partir vers l'est ou de descendre au sud. Rejoignons les Cyclades centrales, Paros et Naxos. Nichée entre Anti-Paros et Paros, la baie de Dhespotiko est un sympathique mouillage isolé, avec quelques maisons et une agréable taverne sur Anti-Paros, nous y savourons le calme et ferons peut-être connaissance avec d'autres navigateurs à l'escale. Il est temps de repartir pour les petites Cyclades, Iraklia, Skinoussa ou Koufonisi au gré des vents et de nos envies, l'accueil y est inoubliable, tavernes au bord de l'eau, petits villages perchés...
Cap à l'est vers Amorgos, l'île du Grand Bleu où nous accosterons à Katapola, un port où les vents rendent l'arrivée parfois mouvementée. La visite du monastère de Chozoviotissa s'impose, spectaculaire construction à flanc de falaise. Si l'horaire s'y prête, on nous offrira un petit verre de liqueur, ainsi qu'une friandise. Admirons également la beauté sauvage de cette côte sud-est d'Amorgos, avant de repartir direction Levitha.
D'Amorgos, nous rencontrons souvent une mer agitée, mais pas dangereuse. Enfin abrités par l'îlot de Kinaros, les dix derniers milles sont plus calmes et une fois entrés dans la baie très protégée au sud de Levitha, nous atteignons notre récompense, un mouillage peuplé seulement de quelques bateaux de pêche, de collègues à la voile, sous le regard des chèvres et des moutons.

A Levitha, nous sommes à une trentaine de milles de la baie d'Emborios à Kalymnos, pour un retour progressif à la civilisation, en rejoignant la route Nord de notre traversée.
Et au sud ? De sifnos, nous plongeons à Ios qui revendique (elle n'est pas la seule !) la tombe d'Homère, un tas de cailloux difficile à trouver, sauf le respect dû à l'aède ! Le poète aurait désiré y être enterré car sa mère était originaire de l'île. Une île aux belles plages où le naturisme est roi. Repartons au sud où nous attend la caldeira de Santorin, nom italien de l'île. Son nom grec est "Thira" et signifie "la porte", point d'entrée vers la civilisation minoenne. Cette caldeira fut formée vers 1470 avant J.C. lors d'un terrible tremblement de terre dont les effets seront ressentis jusqu'en Crète, et seraient à l'origine de la fin des minoens. Les îlots Paléa Kameni ("ancienne brûlée" en grec) et Néa Kameni ("nouvelle brûlée" en grec) apparaitront lors de tremblements de terre plus récents respectivement au IIième et au XVIIIième siècle. L'entrée dans la caldeira en voilier est toujours impressionnante, sous le regard des villages de Oia (prononcer Ya) et Thira perchés sur la falaise, et des plages de sable noir de Néa Kameni. Nous accosterons pour visiter ces merveilleux paysages.

Notre bateau peut ensuite poursuivre sa route vers l'est, pour y découvrir Anafi, petite île discrète près de sa célèbre voisine, puis Astipalaia, une île sauvage superbe dont l'accès n'est pas aisé : à une quarantaine de milles des Cyclades à l'ouest et du Dodécanèse à l'est, les coups de meltem l'été empêchent un développement touristique important, et préservent sa quiétude.
Il est alors temps de rejoindre le Dodécanèse et nos deux autres itinéraires pour atteindre Rhodes la médiévale.

Vous pourrez découvrir ces itinéraires en réservant votre traversée avec Cap Oniros, croisière Egée.
Dans le prochain billet du skipper, découvrez Nisyros, l'île-volcan.

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